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Zac Purton dans la tourmente

25/02/2023

Jockey-vedette du circuit de Hongkong, en passe de remporter une 100ème victoire dans la saison plus vite qu’aucun autre pilote avant lui, l’Australien Zac Purton, déjà cinq fois champion de la colonie, devra payer une amende de 150 000 HK$, soit environ 18 125 €, pour avoir vivement critiqué le nouveau patron des commissaires dans les colonnes du quotidien anglophone South China Morning Post.

Un mois seulement après le début de son mandat, Marc Van Gestel, compatriote de Purton jusqu’alors en exercice en Nouvelle Galles du Sud (Sydney), a déjà son actif neuf mises à pied infligées au cours de six réunions à la tête des juges de courses du Hong Kong Jockey Club. Or Zac Purton a lui-même écopé d’une suspension de deux réunions pour avoir gêné un adversaire, d’où ses commentaires : « La façon dont M. Van Gestel applique les règles lui a déjà valu de perdre la confiance des vestiaires. Si j’étais un jockey extérieur en quête d’un avenir à Hongkong, je pense que je m’en détournerais car je serais en droit de craindre de passer plus de temps à pied qu’en selle. »

La réaction du Hong Kong Jockey Club ne s’est donc pas fait attendre. Zac Purton devra aussi répondre aussi d’une accusation d’avoir tenu des propos déplacés envers son confrère Derek Leung dimanche aux courses à Sha Tin à l’issue d’une enquête… (dernière minute : il a écopé d'une nouvelle amende pour cette autre infraction le dimanche suivant, pour un montant d'environ 6 000 €).

Paradoxalement, la mise à pied de Purton lui permet d’aller le week-end prochain en Australie pour monter Artorius dans les Canterbury Stakes (Gr1), à Sydney. C’est la première fois qu’il se produit dans son pays natal depuis 2018. Un signe ? À la sortie de la crise de la Covid, traitée avec une sévérité extraordinaire à Hongkong, le champion, éprouvé par des problèmes physiques, avait évoqué sa prochaine retraite. Le régime auquel sont soumis les jockeys expatriés à Hongkong est toujours difficile. L’appât du gain est considérable et il contribue à la résilience des athlètes, mais la colonie souffre, comme en témoignent les départs de Joao Moreira et de Blake Shinn des vestiaires de Hongkong ces derniers mois. L'un et l'autre ont évoqué une charge mentale trop forte. Or le réservoir de pilotes de talent à Hongkong est limité et s’ils devaient en plus trop souvent subir d’être mis à pied, des problèmes de disponibilité pourraient apparaître.

La ligne de crête sur laquelle s’est aventuré Purton en mettant en cause l'organisation des courses est étroite, mais la situation dans laquelle se retrouve Marc Van Gesel n’est pas très enviable non plus. Avec cette amende colossale (on imagine mal les commissaires français corriger ainsi un jockey, même après qu’il les aient insultés sur Equidia), le Hong Kong Jockey Club montre qu’il se place délibérément du coté de ses commissaires, mais ce type de vagues n’est certainement pas du goût de l’opérateur, actuellement en négociations très serrées avec le pouvoir délégué à Hongkong par Pékin, et qui veut augmenter ses prélèvements sur les paris sportifs au prétexte léonin que le Club « peut se le permettre ».

C’est perdre de vue que le Hong Kong Jockey Club est un des plus généreux donateurs de Hongkong, qu’il contribue à la construction et à l’entretien de nombreux services publics, et que cette contribution a encore été augmentée pendant la crise sanitaire. C'est aussi ignorer le fait que des prélèvements trop forts bénéficient par ricochet aux opérateurs illégaux...

Qu’à cela ne tienne. Comme tous les gouvernements, autoritaires ou non, Hongkong-Pékin n’aime pas qu’on gère de tels fonds sans avoir son mot à dire. Ceux qui détiennent le pouvoir ignorent volontiers les conséquences délétères de leurs décisions pourvu que leurs plus bas instincts, l'envie et la cupidité, ne soient sollicités.

Rien de chinois là-dedans : c’est la nature même du pouvoir, où qu’il s’exerce et quelle que soit la façon dont ceux qui en jouissent y sont parvenus.